mercredi 14 juillet 2010

19-02-2010 : Loja, canton écologique (et Irkita V3)

A nouveau pays, nouvelle apparence. Il faut dire que j’en avais marre de mon look 2.0 (deux point zéro) qui me donnait des allures de souris d’ordinateur, m’a-t-on soufflé (et qui n’a fait broncher personne d’ailleurs, snif…). Alors, à la moulinette d’un x-trem relooking, je change  une nouvelle fois d’allure. Humanoïde, Irkita ? A force de côtoyer des humains, peut-être …



Sympa la petite écharpe non ? Vous pouvez m’appeler Irkita-Mitterrand !

Fiers de ma nouvelle apparence, nous partons m’exhiber dans les rues de la ville. Loja, ça a beau être la quatrième ville du pays en population et la capitale de la province, on se dirait dans une petite ville. Province ? Vous étiez incollables sur la division administrative péruvienne, vous serez imbattable sur celle de l’Equateur. Donc, le pays est divisé en provinces, elles même découpées en cantons, dans lesquels on trouve de paroisses (parroquia). Facile, non ?

A première vue, et ce n’est pas une surprise, l’Equateur ce n’est pas le Pérou, même si on y parle la même langue et que le pays a fait partie, lui aussi, de l’Empire Inca. D’abord, évidement, parce qu’on y mange (un peu) moins bien, même si nos expériences à  Loja sont plutôt bonnes, ensuite, et cela nous étonne un peu, le pays à l’air plus riche. Peut-être est-ce le changement de monnaie ? Le passage du nouveau sol péruvien au dollar états-unien est effectivement déroutant. Et oui, l’Equateur a été « dollarisé ». En 2000, suite à une énième crise financière et pour tenter d’endiguer une inflation chronique, le pays abandonne le Sucre nommé ainsi en souvenir du célèbre maréchal de Simon Bolivar, libérateur du pays. Cette réforme monétaire a d’ailleurs valu sa tête au président de l’époque, Jamil Mahuad (oui, oui vous avez bien lu, il y a une communauté libanaise en Equateur). Autant le dire tout de suite, et c’est une autre particularité équatorienne, ici, être président c’est avoir un emploi précaire, limite intérimaire. Pas moins de 55 dirigeants en à peine plus d’un siècle – soit une durée de mandat en moyenne de deux ans : un record absolu pour l’Amérique latine plutôt habituée (il y a pas si longtemps) aux dictatures qui durent ? Autant le dire, la pression populaire est forte. Surprenant, non, quand on connait le goût de certains pour les coups d’Etat militaires. Ici, au contraire, si on doit désigner un acteur comme responsable, il faudrait peut-être regarder du côté des indigènes, et notamment en direction de la fameuse confédération des nationalités indigènes de l’Equateur d’Equateur, la célèbre CONAIE. Pour l’instant, on n’en sait pas beaucoup plus, mais on compte bien profiter de notre passage pour en apprendre autant qu’on pourra.

Ce qu’on sait en revanche, c’est que si, dans un premier temps, l’organisation indigène, via son bras politique, le Pachakutik, a soutenu le processus voulu par le président du pays, Rafael Correa, en participant à la rédaction de la nouvelle Constitution, aujourd’hui, le divorce semble consommé. Le point de friction se situe notamment autour des thèmes de l’exploitation minière et de la gestion de l’eau, ce qui nous intéresse de très près, comme vous vous en doutez. Evidement, on ne va pas tomber dans la facilité en donnant raison par avance aux « gentils » indigènes. Depuis notre séjour en Bolivie, on sait qu’ils font aussi de la politique, d’autant plus dans les pays andins et notamment en Equateur.

Ce que je dis là un peu crument n’est certes pas une révélation pour la plupart d’entre vous. Mais beaucoup de personnes, surtout depuis les fractions militantes occidentales, ont aujourd’hui de l’Amérindien une vision romantique à la « bon sauvage » de Montaigne, avec tous les clichés que cela comporte, dont celui de forcément lui donner raison. La réalité est évidement bien plus compliquée ou plus simple, au choix, puisque finalement, avant d’être un indigène, l’indigène est un être humain.

D’autre part, on a l’intention de découvrir le processus politique, la célèbre « révolution citoyenne », du (relativement) jeune et (relativement) beau président du pays. Ce dernier, à gauche sur l’échiquier politique du continent, souffle le chaud et le froid. Le chaud, par exemple, lorsqu’il réussit à renégocier une partie de la dette qu’a son pays auprès du FMI en la qualifiant d’illégitime. Le froid, quand il menace une des plus célèbres organisations écologistes du continent, Accion Ecologica, de lui supprimer sa personnalité morale. Ca aussi, on aimerait comprendre.

En attendant, nous parcourons, non sans un certain plaisir, les rues calmes et fraiches du centre historique de Loja. Si elle n’a pas la splendeur d’une Arequipa ou d’un Sucre, Loja semble être une ville où il fait bon de vivre. Peut-être un peu trop tranquille ?


Si nous nous y sommes arrêtés, au-delà du côté pratique, puisque c’est la première grande ville après la frontière avec le Pérou de ce côté-là du pays, c’est aussi parce qu’on en parle déjà depuis quelques temps. Connue et reconnue pour être la capitale écologique du pays, Loja a une réputation qui dépasse les frontières. Déjà à San Ignacio au Pérou, on nous ventait ses mérites. Alors, même si on est un vendredi en fin de journée et sans avoir aucun contact établi au préalable, nous partons faire notre enquête. C’est presque une maladie, non ? Bien cachée dans une poche, je n’envie pas mes compagnons lorsque je les entends s’essayer dans leurs explications sur les mouvements sociaux face à un employé de l’antenne locale du ministère de l’environnement qui rétorque « Je ne comprends pas, vous voulez des informations sur les balades à faire dans le coin ? ».

Finalement, nous nous retrouvons dans les bureaux chargés des problématiques environnementales de la province (sorte de conseil régional) où on a eu la gentillesse de nous recevoir. On y apprendra que la priorité est le traitement de déchets (la décharge de Loja y est effectivement pour beaucoup dans la réputation « verte » de la ville) et, surtout, l’éducation des enfants. Vaste programme. Alors que nous nous apprêtons à tirer notre révérence, le voisin de la personne chargée de nous accueillir s’emporte « vous voulez des vrais conflits sociaux-environnementaux ? Allez voir l’ONG gringa Nature & Culture International, qui, sous prétexte de conservation de l’environnement se crée des réserves privées de forêt, et, petit à petit, devient propriétaire des sources d’eaux de la région… ». Merci pour l’info, ce n’est pas tombé dans l’oreille d’un chat. La preuve, maintenant tout le monde peut le lire !

Au moins, cette petite escapade dans l’administration de Loja nous aura permis d’admirer la coupole du bâtiment de la province. Magnifique ! Comme quoi, ça vaut le coup de faire du tourisme alternatif … Bon, il faut dire aussi qu’on est un peu perplexes. Présenté comme exemplaire, l’« écologisme » de la province de Loja ne semble pas casser trois pattes à un chat. Dommage. Je parle de l’écologisme, évidement. Et heureusement pour les chats.

Le soir venu, alors que mes compagnons se désaltèrent dans le bar (probablement) le plus sympa de la ville, une expo anar sur le recyclage nous prend au dépourvu. Comment est-ce que je sais que c’est une expo anar ? Facile, tout les « c » ont été remplacés par des « k ». Qui a dit que l’anarchisme c’était ne pas avoir de règles ?! Personne, bien entendu. Est-ce que Loja serait plus anar qu’écolo ? 


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Kri kri 
Irkita

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