jeudi 22 juillet 2010

Du 21-02-2010 au 24-02-2010 : Quito (1ière partie), comme à la maison

1 – « Casa, dulce casa »

Ce matin du 21 février, après une nuit de bus ressemblant à toutes les autres nuits de bus, lorsque nous débarquons dans une construction immense aux airs d’aéroport, il nous faut un peu de temps pour comprendre où nous sommes. L’ensemble porte le nom de « Quitumbe ». C’est le nouveau terminal routier de la ville, construit avec la volonté, paraît-il, de désengorger le centre où se situant l’ancien terminal qu’Anna et Jérémy avaient connu lors des précédents voyages. On kri-krisse un peu quand même quand on apprend qu’il nous reste encore une heure de transport avant d’arriver à destination… Mais de toute façon, on n’a pas le choix, et puis la situation n’est pas si dramatique que ça… du moins pour moi, qui, au lieu de porter de gros et lourds sacs à dos, me fais porter. Et aussi parce que le système de trolleybus de la capitale équatorienne fonctionne plutôt bien et, malgré un mode d’emploi un peu confus, un transport nous amène directement où il faut …

Alors, lorsqu’on arrive dans le centre historique de la ville, où nous avons rendez-vous avec un compatriote qui nous a gentiment proposé de nous héberger (merci !), on est contents. Moi, parce que les grandes villes - et encore plus les capitales - me captivent : la promesse d’y découvrir de nouvelles spécialités fromageuses y est pour beaucoup ! Pour ce qui est de mes compagnons, comme ils connaissent déjà les lieux, c’est un peu comme rentrer à la maison. Aux souvenirs encore tenaces de la lutte des compañeros de Ayabaca et à la sensation d’avoir encore un peu la tête dans les nuages et les pieds dans la terre (centenaire) de Vilcabamba, s’ajoute l’enthousiasme de découvrir la richesse politique et sociale équatorienne qui nous promet beaucoup.

Gruyère suisse sur le gruyère français, l’ami qui nous accueille vit dans une grande et lumineuse maison d’architecte, en forme de bateau, située dans un quartier tranquille, la Floresta. Nous avons aussi trois autres raisons d’être contents. La première, c’est que notre hôte a les coordonnées de beaucoup de personnes que l’on aimerait rencontrer; la deuxième, c’est qu’il va pouvoir nous raconter plein de choses ; enfin, la dernière et pas la moindre : il y a du saucisson et du pastis pour l’apéro ! « Comment Irkita, tu bois du pastis ? » « Et alors ? Vous croyez qu’elles font quoi les souris de Marseille lorsqu’elles ont soif ?… ». Alors, on s’installe. Déjà, des piles de bouquins à lire pour mieux comprendre le contexte du pays s’amoncellent de part et d’autre de notre lit improvisé.  « Comme à la maison » ! « Qu’est ce qu’on dit ? » « Merci ! ».

Le quartier la Floresta, un peu surélevé, est bordé par un flanc de montage recouvert d’arbres d’un côté et par la vallée où s’étend la cité de l’autre. Située à 2850 mètres au dessus du niveau de la mer, une croute de fromage en comparaison avec la Paz et ses presque 4000 mètres d’altitude, la capitale équatorienne, entourée de sommets volcaniques et verdoyants, est une ville habituellement fraîche où il pleut assez souvent. Sauf que - et c’est apparemment inhabituel - le climat de cette fin du mois de février est particulièrement clément et ensoleillé. Mes compagnons en sont un peu déboussolés. Eux, qui se souvenaient d’une cité aux quatre saisons quotidiennes, printemps frais le matin, été doux le midi, automne pluvieux le soir et hiver frisquet la nuit, ne s’y retrouvent pas. De mon côté, l’écharpe dont je me suis dotée à Loja est du coup un peu superflue. Pas grave. Cette chaleur anormale va nous permettre de parcourir à pied une bonne partie de la ville sans nous retrouver trempés par les averses. Et, en commençant tranquillement à glaner des rendez-vous, on prend un rythme boulot-trolleybus/pieds/pattes/dodo qui n’est pas pour nous déplaire.

La partie moderne (par rapport à la partie coloniale dite historique) de la ville, où s’enchainent petites rues aérées et maisons individuelles confortables qui donnent une apparence troublante de richesse, se parcourt sans aucun « sentiment d’insécurité ». La boulangerie voisine nous régale de délicieux produits pour nos petits déjeuners. Entre le café internet branché au quartier Mariscal - aussi connu comme « Gringolandia » en raison d’une forte concentration de cafés et de restaurants de « classe internationale » qui attirent les touristes de passage -, notre temporaire demeure confortable et le bureau de notre ami à la Flacso d’où la vue est spectaculaire, la capitale équatorienne nous accueille bien!



2 – L’Equateur, un grand pays amazonien

« Et le boulot dans tout ça ? A-t-on abandonné nos compagnons de lutte ? Quid des mouvements socio-environnementaux ? » Patience, ça arrive et ce n’est pas du n’importe quoi !

On qualifie souvent l’Equateur de « petit pays andin ». C’est incorrect pour au moins deux raisons. La première est que la partie andine du pays, la Sierra - bien que la concentration de la population y soit la plus forte -, ne couvre en réalité que la partie montagneuse et volcanique du centre, bordée à l’ouest par les régions côtières de l’océan Pacifique et, à l’est, par l’Amazonie qui représente un gros tiers du territoire national. La deuxième raison est due au caractère souvent dépréciatif, mignon-alors-pas-grand - je sais de quoi je parle ! - qu’implique le qualificatif « petit ». Certes, en termes de superficie l’Equateur, avec ses 283 000 km², n’est pas ce qui existe de plus grand. Mais si pour déterminer la grandeur d’un endroit on utilisait le critère du rayonnement des personnalités qu’il a vu naître, avec sa tripotée de célébrités socio-écolo-politico-indigéno-universitaires, l’Equateur serait incontestablement un « grand » pays : Alberto Acosta, Accion Ecologica, Esperanza Martinez, Blanca Chancoso, les Sarayaku, et j’en passe.

En attendant nos premiers rendez-vous qui vont nous amener à faire la rencontre de ces quelques « stars » de l’Amérique latine, nous profitons de nos derniers instants de repos pour dégrossir la situation avec une amie d’amie qui vit ici depuis des années. Pour cette européenne, arrivée ici il y a plus de 20 ans, la situation est contrastée. Elle nous confirme nos premières impressions : « l’Equateur, c’est tout sauf simple ». Voire même compliqué. Et à la question « alors, est-ce qu’il est vrai que l’Equateur a trouvé le bon équilibre entre le besoin de se développer (au sens classique du terme) et la nécessité de protéger l’environnement en invitant les mouvements sociaux, les écologistes et les universitaires à sortir de l’opposition ou de la réflexion passive pour participer à la gestion du pays ? », la réponse paraît être normande : « oui, mais non ; non, mais oui ».

En attendant que mes neurones déjà chauffés à blanc deviennent du pop-corn, je mange celui qui nous est offert par le café-bar-salle-de-concerts-café-internet où nous sommes et je me concentre sur des questions peut-être moins importantes, mais tout autant dépourvues de réponses, comme par exemple : « pourquoi est-ce que cet endroit s’appelle-t-il el pobre diablo (le pauvre diable) » ?


Sur le chemin qui nous mène à la maison, pendant que mes deux compagnons s’époumonent en débats et hypothèses que je trouve un peu prématurées, une série de scènes cocasses me font me questionner aussi sur mon équilibre mental. Entre autres choses, un chat chassant un graffiti version punk de mon (lointain) frère Mickey, Chavez jouant aux échecs avec Obama et une série de « Jésus pendus en l’air » finissent par me convaincre. En Equateur, les choses ne sont pas comme ailleurs…

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Kri kri
Irkita

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